Qui prendra la tête de l’Assemblée nationale ?

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Qui succèdera à Drama Dramani qui ne s’est pas représenté lors des législatives du 20 décembre dernier ? Alors que la rentrée parlementaire est réglementairement prévue pour ce 08 janvier, le suspense reste entier. La seule certitude est que le prochain président de l’assemblée nationale sera issu des rangs de l’Union pour la République (UNIR, majorité) qui a obtenu 59 des 91 sièges qui étaient en jeu, soit 3 de moins que lors des élections de 2013. Néanmoins, les pronostiqueurs parient sur une short-list dans laquelle FOCUS INFOS a sélectionné quatre noms, sans doute parmi lesquels celui de la future personnalité qui se retrouvera au perchoir.

Les favoris :

Sélom Komi Klassou
L’actuel Premier ministre est annoncé par les pronostics comme le principal favori pour être au perchoir de la prochaine Assemblée nationale. Elu le 20 décembre dernier dans son fief du Haho pour sa troisième participation de rang à des élections législatives, il fait partie des hommes d’expérience et de caractère susceptibles d’occuper cette fonction. Il a d’ailleurs assuré la première vice-présidence du parlement de 2013 à 2015 avant d’être appelé à diriger le gouvernement aux lendemains de la présidentielle. Au moment où plus de 90% de la chambre est renouvelé et celle-ci rajeunie, l’expérience sera d’une importance certaine pour encadrer tous les nouveaux venus qui seront à leur première, et assurer un travail de qualité.

Cependant, pour se retrouver à la tête de l’Assemblée nationale, il lui faut quitter la Primature. Ce qui n’est pas acquis. En effet, quand bien même plusieurs observateurs misent sur un changement de Premier ministre, il n’est pas certain que le Président de la République fasse ce choix, à quinze mois du crucial scrutin présidentiel. Car SelomKlassou dispose de deux atouts –maîtres dans sa manche. D’abord , il est originaire et bien implanté dans les Plateaux , la région qui fait basculer l’élection. Ensuite, avec son parcours, il a le profil d’un « politique » et d’un « combatif », important dans le cadre de la prochaine élection présidentielle, qui s’annonce disputée. « Son maintien ou non à la primature, c’est du 50/50 », nous confie un habitué du Palais de Kégué. Il partirait si l’option d’un profil plus « technocrate » l’emportait.

AklessoAtcholi

Si SelomKlassou rempile à la Primature, le perchoir pourrait échoir à l’effacé AklessoAtcholi, administrateur civil et actuel secrétaire exécutif d’UNIR. Depuis le congrès d’octobre 2017 qui l’a fait découvrir au grand public, il a la lourde charge de conduire la structuration du parti et de le mettre en ordre de bataille pour les échéances à venir, dans un contexte de crise politique, de rivalités internes et de frustrations multiformes.

Elu dans la préfecture de Blitta dans la région Centrale, il fait partie des personnalités en vue dont le parcours atteste non seulement de leur connaissance du régime mais aussi de leur loyauté. Mais il devra éliminer plusieurs handicaps. Le premier est qu’il est au secrétariat exécutif depuis seulement un an (dans le faits, il est le véritable patron du parti auquel il se consacre à temps plein ; le président étant pris par ses charges de Chef de l’Etat et les vice-présidents par les leurs à la tête d’importantes institutions.) La mission de structuration du parti vient donc à peine d’atteindre sa vitesse de croisière pour qu’il quitte ses fonctions. A moins qu’il ne cumule les deux ; ce qui ne lui permettrait pas de s’occuper à plein temps du parti, critère premier de son élection à ce poste.

Le second handicap est qu’il n’a pas d’expérience parlementaire, dans un contexte de renouvellement et de rajeunissement de la chambre des députés, son élection le 20 décembre dernier étant sa première. Il pourra cependant évoquer sa maîtrise de l’administration au titre de sa formation mais aussi de sa dizaine d’années comme préfet. Tout en se prévalant également de son passage au ministère de l’Administration territoriale comme directeur de cabinet, même si l’expérience fut éphémère.
Mais en toute hypothèse, rassure son entourage, « Atcholi est un bosseur et un vrai combattant ; il s’adaptera à toutes les situations ».

Ibrahima Mémounatou

L’expérience est pour Ibrahima Mémounatou, son principal atout. Réélue le 20 décembre dernier sur la liste UNIR qu’elle a conduite dans la circonscription électorale du Grand Lomé, elle était 2è vice-présidente dans l’assemblée sortante. A ce titre, elle est très au fait du travail parlementaire. Comme vice-président du parti, ancienne ministre et associée aux grandes décisions ainsi qu’à la vie de sa formation politique, elle est pourvue pour postuler au perchoir.

Son statut de femme peut constituer par ailleurs un ultime atout, dans un contexte de promotion du genre et où aucune femme n’a jusque-là occupé cette fonction. Son handicap pourrait être son manque de « technicité » selon des cadres du parti, pour diriger une assemblée qui sera très sollicitée lors de la prochaine législature sur des questions qui iront au-delà de la problématique des réformes constitutionnelles et institutionnelles.
Le fait que l’assemblée soit très largement renouvelée ne milite pas non plus en sa faveur. Pas plus que son implication dans les « jeux d’appareil » qui font dire à ses contempteurs qu’elle n’est pas tout à fait une personnalité « ouverte », qualité indispensable pour présider un parlement. « Elle a démontré ses compétences et sa capacité à dialoguer à chaque fois qu’elle a occupé un poste de responsabilité, que ce soit au sein du parti, au gouvernement ou à l’assemblée nationale » corrige un de ses proches.
« Il lui manque encore un palier pour atteindre le perchoir » croit savoir un cadre d’UNIR. « Peut-être la prochaine fois » conclut-il.

Bamouni Stanislas Baba

Quatrième sur notre short list, l’actuel ministre Conseiller du Président de la République pourrait créer la surprise et être élu dans les prochains jours à la tête de l’Assemblée nationale. Elu le 20 décembre dernier dans la circonscription électorale de l’OTI/OTI SUD sur la liste d’UNIR qu’il conduisait, le très discret conseiller de Faure Gnassingbé sur les questions maritimes et celles relatives aux réformes politico-économiques en vue de l’atteinte des conditions d’éligibilité au Millenium Challenge Account , « est un technicien hors pair, qui maîtrise ses dossiers qu’il conduit avec rigueur », dit de lui un membre du gouvernement. De fait, il pourra conduire depuis le perchoir les réformes nécessaires dont le pays a besoin pour faire des sauts qualitatifs en matière économique et sociale. « C’est une personnalité qui pourra parler le même langage que le gouvernement et ses techniciens ; lui-même ayant été par ailleurs au gouvernement » décrit un nouvel élu, qui en fait son favori.
Outre cet avantage, il sera depuis longtemps le premier président de l’assemblée nationale qui ne soit pas véritablement un homme du sérail qui plus est, avec un profil purement « technocrate ». Son handicap reste son inexpérience parlementaire et ses absences de lien avec les différents « réseaux » au sein du parti. La légitimité acquise avec son élection sera-t-elle suffisante pour faire pencher la balance en sa faveur ? Les prochains jours devraient nous édifier. La question de l’équilibre géopolitique sera aussi scrutée puisque depuis l’arrivée de Faure Gnassingbé au pouvoir, les présidents de l’assemblée nationale provenaient de la région centrale, tandis que monsieur Baba est des Savanes. Précisons toutefois que sous feu Gnassingbé Eyadema, FambaréNatchaba, lui aussi originaire des Savanes, a présidé le parlement.
Il semble qu’au moment du choix, ce sont davantage ses fonctions relatives au MCA et sur les questions maritimes qu’il faudra alors confier à d’autres, qui pèseront. Mais Mme Sandra Johnson pour les premières et M. Hubert Bakaï pour les secondes, sont des potentiels remplaçants aux compétences affirmées.