Edito : L’ambitieux plan de développement

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Par Kokouvi Ekpé AGBOH AHOUELETE

Huit mois après son adoption, le Plan national de développement (PND) a été officiellement lancé le 04 mars dernier à Lomé. Conçu pour la période 2018-2022, il vise la transformation structurelle de l’économie togolaise. Désormais, il est le référentiel en matière de développement du pays et entend s’adosser sur les résultats de la Stratégie de croissance accélérée et de promotion de l’emploi (SCAPE), mise en œuvre entre 2013 et 2017et qui a permis, selon les chiffres officiels, d’atteindre une croissance de 5,6 % contre un taux moyen de 3,9% sur la
période 2007-2013.

Dans le scénario optimiste, l’impact du PND permettrait à la croissance de s’accélérer à partir de 2019 pour s’établir à 7,6 % en 2022, soit une moyenne de 6,6%. D’après les projections du PND, l’effet du plan serait tel qu’il permettrait au pays de créer au moins 500 000 emplois, voire 750.000 selon l’ancien Premier ministre actuel
Président du Fonds International de Développement Agricole (FIDA), et in fine d’accroître le revenu par tête de 9,7 %. Une telle performance devrait induire, selon les concepteurs, une baisse significative de l’incidence de la pauvreté monétaire à 44,6 %, permettant ainsi au pays de grappiller 14 points dans l’indice du développement
humain.

Ce sont de grandes ambitions mais le chemin reste encore long pour parvenir à ces résultats. Il faudra d’abord que les choix stratégiques contenus dans ce plan considéré par les experts comme présentant des avantages compétitifs avérés, soient portés par l’ensemble de la population. Cela passe par son appropriation par les différentes couches sociales de notre pays et leur adhésion.

Il faudra ensuite créer de la confiance pour attirer les investisseurs et les convaincre de la pertinence de la
démarche du pays ainsi que de la réalité du potentiel exposé dans le PND ; d’autant plus que 65% du financement
attendu de ce plan devrait provenir du secteur privé. C’est dire donc que, dans un environnement concurrentiel où
plusieurs de nos voisins dont le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Bénin ou encore le Burkina-Faso ont aussi leur plan de développement, il faudra montrer des signaux importants pour être compétitif. Notamment en matière de bonne
gouvernance, d’orthodoxie financière, d’une justice équitable. Pour être attractif, il faudra nécessairement et
inéluctablement insister sur l’amélioration du climat des affaires déjà en cours, se débarrasser de certaines pratiques prédatrices de l’économie comme les monopoles de fait, les entraves à la libre concurrence, les marchés publics faussés, le harcèlement fiscal, etc.

La confiance qui ne se décrète pas selon l’un des experts invités lundi au lancement, est également tributaire du
climat politique qui peut coûter des points de croissance et faire fuir les investisseurs. De fait, pour ne pas pâtir d’éventuels remous-sociopolitiques, il est également indispensable d’opérer les réformes constitutionnelles
et institutionnelles, qui nous mettront définitivement à l’abri des soubresauts que nous avons connus en 2017.

Ce n’est qu’à ces conditions qu’on pourra soutenir en 2022 que le PND n’a pas été qu’un catalogue de bonnes
intentions et que le Chef de l’Etat, qui y croit à juste titre, aura eu raison d’affirmer que ce n’est pas juste un plan de plus.