La filière de l’anacarde est en pleine croissance

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La filière de l’anacarde fait l’objet d’une attention particulière ces dernières années. Elle est classée 4ème filière d’exportation au Togo après le café, le cacao et le coton. D’une quantité de 12 000 tonnes en 2017, la production de noix de cajou est passée à 15 000 tonnes pour une exportation de 21 000 tonnes à fin 2018. La filière présente des opportunités et constitue un véritable bassin d’emplois. Et l’Etat, les producteurs et autres acteurs des chaînes de valeur, les partenaires ainsi que le secteur privé s’investissent dans sa promotion.

La production de l’anacarde au Togo remonte dans les années 1960 avec l’implantation des champs collectifs gérés par les SORAD (Sociétés régionales d’aménagement et de développement) pour approvisionner la société para-étatique TOGOFRUIT (Société nationale pour le développement de la culture fruitière). La fermeture de ces sociétés portera un coup dur à la filière de l’anacarde qui va régresser au cours des années qui s’ensuivront. Malgré l’installation de l’usine « Cajou Espoir » basée dans la préfecture de Tchamba en 2004, la période de latence de la production de noix de cajou devra durer encore plus. La filière n’aura connu un regain d’intérêt qu’en 2010 avec la volonté du Togo de relancer la croissance de son secteur agricole à travers le Programme National d’Investissement Agricole et de Sécurité Alimentaire (PNIASA).
Chiffres clés de la filière Produite par une quinzaine de pays en Afrique dont la majorité reste localisée dans l’Ouest, la noix de cajou connait une forte progression annuelle de 10%. D’environ 1 million de tonnes en 2012, la production de noix de cajou a atteint selon les récentes statistiques 1,5 millions de tonnes de noix brutes, soit 60% de la production mondiale. Dans un récent classement sous régional élaboré par l’Initiative du Cajou Africain (ICA), la quantité produite par le Togo reste faible, comparativement à celle d’autres pays tels que comme le Bénin (200 mille tonnes), le Burkina Faso (120 mille tonnes), le Ghana (200 mille tonnes) et la côte d’Ivoire (750 mille tonnes), le leader mondial de production de noix de cajou. Au plan national, la production de noix de cajou brute était évaluée en 2014, par la Direction des Statistiques agricoles de l’Informatique et de la Documentation (DSID), à 6 268 tonnes pour une superficie totale de 18 527,45 ha exploitée par 18 262 producteurs répartis dans les quatre régions septentrionales, productrices de l’anacarde au Togo. En 2018, l’on a enregistré un total de 15.000 tonnes de noix de cajou produit selon les statistiques communiquées par le ministère de l’Agriculture à l’issue de la campagne de commercialisation contre 12 000 tonnes en 2017, soit une augmentation de 3000 tonnes. Courant la même campagne 2018, le Togo a exporté 21 000 tonnes, soit 6 000 tonnes de plus
que la production nationale. Cet écart s’explique par la réexportation d’une certaine quantité de noix de cajou provenant des pays voisins. Pour la campagne 2019 lancée il y a quelques jours, les acteurs des chaines
de valeurs de la filière anacarde ont annoncé un volume prévisionnel de 24000 tonnes, tandis que les exportations attendues sont estimés à 27000 tonnes. La croissance de la production devrait être maintenue pour atteindre à l’horizon 2022, 30000 tonnes et générer près de 21 500 emplois, en prenant en compte l’ensemble des maillons des différentes chaînes de valeurs de la filière anacarde avec une capacité de transformation utilisée de 7 050 tonnes. Il est à noter que la transformation de l’anacarde reste concentrée en majorité sur la noix de cajou. En 2018, on recensait quatre (04) usines privées de capacité de 10000 tonnes de noix brutes implantées respectivement à Tchamba, à Blitta et à Sokodé et qui emploient plus de 900 personnes.
Des défis malgré la croissance La croissance enregistrée depuis 2014, bien qu’elle soit maintenue, fait ressortir divers défis à relever par le Togo pour rapprocher sa production de celle des pays voisins ou encore
pour en tirer plus d’avantages. A la direction des filières végétales du ministère de l’Agriculture, l’on pense à la nécessité d’une amélioration quantitative et qualitative de la disponibilité de la noix de cajou, au renforcement de l’organisation et de la structuration ainsi que la gouvernance au sein de la filière et à la promotion des chaînes de valeurs biologiques au sein de la filière anacarde. « Vu le classement de notre pays dans la production de la filière de l’anacarde dans la sous-région et au plan mondial, et en considérant les potentialités pour l’extension des superficies de production à couvrir ainsi que les marges d’amélioration de la productivité, nous sommes appelés à travailler à un positionnement de la filière anacarde togolaise sur des marchés de niche, en l’occurrence
celui des produits biologiques de la filière. Ceci pourra permettre de jouer beaucoup plus en termes de différentiel qualité que sur le plan qualitatif », explique le Directeur des filières végétales Anani Kpadenou. En outre, le Togo devra œuvrer à valoriser la production d’anacarde et à faciliter des relations d’affaires entre les acteurs et au renforcement des services de support des chaînes de valeurs agricoles (CVA) de la filière anacarde en termes de recherches/ innovations, d’information, de formations techniques, de conseil de gestion, et vente groupée. Pour les unités de transformation, le défi réside dans l’approvisionnement en matières premières. De fait, cellesci font face à une concurrence pour l’achat de la matière première avec les exportateurs internationaux dans un environnement de marché très ouvert. Cette compétitivité justifie d’ailleurs le faible niveau de transformation locale. Ainsi, le président des exportateurs de la filière anacarde Robert Sedjro, juge important l’apport de financement et des investissements privés pour booster la filière de l’anacarde au Togo. Ces défis devraient être levés, afin que la perspective gouvernementale de la filière, qui consiste à assurer une contribution optimale de la filière anacarde à l’atteinte des objectifs du plan national de développement (2018 – 2022), notamment en ce qui concerne l’axe 2 à travers la promotion de chaînes de valeurs porteuses susceptibles d’induire un développement de l’agroindustrie, soit réalisée.

FGFAT : le fonds spécial qui va booster la filière de l’anacarde Le gouvernement, avec l’appui des partenaires au développement, a mené différentes interventions et actions pour la promotion du secteur de l’anacarde sur le plan national. L’une de ses actions est la mise en place par décret du Fonds de Gestion de la
Filière Anacarde au Togo (FGFAT). Ce Fonds institué en 2018 se présente comme une innovation dans la mobilisation des ressources pour le financement de la filière. Le FGFAT sera alimenté par des prélèvements sur la noix de cajou brute et transformée, et des contributions des partenaires au développement, les dotations de l’Etat, entre autres acteurs. Selon le décret, les prélèvements sont de 40 FCFA par kilogramme sur les noix de cajou brutes et de 5 FCFA sur les noix de cajou transformées. Un compte dédié à ce Fonds est ouvert dans les livres du Trésor public afin de garantir une bonne traçabilité des opérations. En phase d’opérationnalisation, le FGFAT sera géré par un comité composé de tous les acteurs impliqués dans la promotion de la filière. Au-delà de ce fonds spécial, l’Etat togolais a procédé pour la promotion de la filière anacarde, à l’organisation et à la structuration des acteurs avec notamment la mise en place du Comité Interprofession de la Filière Anacarde au Togo (CIFAT) et du Comité de Coordination de la Filière Anacarde au Togo (CCFA). Il a été aussi défini par l’Etat, les statuts et compétences des acteurs de la commercialisation de la noix de cajou brute et de ses produits dérivés et à la réglementation de l’activité de commercialisation de la noix de cajou brute et de ses produits dérivés.
L’on note aussi dans les actions de l’Etat l’amélioration du matériel végétal avec l’accompagnement et l’amélioration du matériel végétal à travers l’introduction de semences améliorées, la mise en place d’un dispositif de sélection d’arbres élites et la mise en place de parcs à bois pour la fourniture de greffons. De plus, il a été initié en faveur de la filière anacarde un Projet d’appui au développement des filières anacarde et karité (ProDAK) pour l’amélioration de la qualité des produits. Le programme de productivité agricole en Afrique de l’ouest – projet Togo (PPAAO-Togo), le projet d’appui secteur agricole (PASA), ont permis aussi de soutenir les acteurs de la filière. Pour la période 2019-2022, un contrat programme de développement de la filière anacarde a été signé entre le gouvernement et le CIFAT. Le renforcement de la contribution de la filière à l’équilibre de la balance commerciale, la promotion de l’investissement et la création de nouveaux emplois décents avec une amélioration des revenus et l’optimisation de la valorisation de la noix et de la pomme de cajou au Togo sont les principaux objectifs de ce contrat.