Sacrés « Panafricains »

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Le 24 février dernier, la Russie a lancé par voie aérienne, terrestre et maritime, une attaque contre l’Ukraine, installant depuis lors au cœur de l’Europe, une guerre dévastatrice, avec son lot de morts et de blessés ainsi qu’un exode massif de populations. Pour justifier cette guerre, Vladimir Poutine, le président russe a allégué   la nécessité d’une part « de protéger les personnes soumises à des brimades et à un génocide », d’autre part de « démilitariser et de dénazifier » ce pays  de plus de 40 millions d’habitants. Ce conflit qui se déroule à des milliers de kilomètres du continent semble captiver l’intérêt des Africains, notamment au sud du Sahara.

Mais alors qu’on aurait pu penser que ceux-ci, sachant plus que quiconque ce que peut vivre un peuple subissant la loi du plus fort que lui, se mettent du côté des Ukrainiens ou au minimum, adoptent une position de neutralité, beaucoup se proclamant pourtant «panafricains », applaudissent le maître du Kremlin.

Curieuse attitude que celle de se poser en héraut de la renaissance africaine, en chantre de la souveraineté de nos pays, de dénoncer l’ingérence séculaire des Occidentaux dans les affaires intérieures de nos Etats,  tout en portant au pinacle l’ancien agent du KGB. Surprenante posture que celle d’avoir dénoncé la guerre illégitime d’Irak, la destruction de la Lybie et la liquidation de Mouammar Khadafi par l’OTAN, le parti pris de la France dans le conflit fratricide ivoirien, d’abhorrer les sanctions américaines contre Cuba etc.., tout en légitimant l’incursion guerrière de la Russie dans un Etat démocratique.

Les velléités expansionnistes des puissances mondiales ont toujours été, depuis les temps immémoriaux, soutenues par des prétextes sécuritaires, commerciaux voire de civilisation. S’il y a un mouvement mondial, notamment des peuples qui en ont été ou en sont toujours victimes, pour mettre fin à l’impérialisme occidental et appeler à un monde plus équilibré, plus juste et multipolaire, ce n’est certainement pas pour accompagner la Russie dans cette aventure guerrière.

Celle-ci devrait être condamnable au nom des valeurs que prétendent promouvoir les panafricains et au regard de l’histoire, voire du présent, qui sont les leurs. Tout le monde s’accorde à dire que les systèmes politiques et les modes  de gouvernance de nos Etats, nés  des mouvements pour la  libéralisation de l’espace public  des années 90, et copier coller des modèles occidentaux ont montré leurs limites ; les  reflux démocratiques ainsi que les coups d’Etat constatés ça et là en sont les parfaites illustrations.

De fait, les défis de nos Etats doivent être dans les prochaines années de repenser nos sociétés et d’inventer des modèles qui tiennent compte de notre histoire, de nos vécus et de nos réalités. Cependant, là où les modèles importés occidentaux ont échoué, ce n’est certainement pas celui venu de Russie qui sera la panacée.